Un tueur sur mesure de Sam MILLAR
Un tueur sur mesure
de Sam MILLAR
Editions Métailié (Noir),
2021, 285 p.
Première Publication (vo) : 2018
Pour l’acheter : Un tueur sur mesure
Né à Belfast en 1958, Sam Millar a fait de la prison en Irlande du Nord comme activiste politique au sein de l’IRA et aux États-Unis comme droit-commun après y avoir perpétré l’un des hold-ups les plus spectaculaires de l’histoire du pays, le fameux casse de la Brinks de Rochester. Après sa condamnation, il est rentré à Belfast pour écrire. Son expérience est décrite dans On the Brinks. Il a reçu de nombreux prix littéraires et ses livres ont été traduits dans plusieurs langues. (Métailié)
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Braquer une banque à Belfast le jour d’Halloween déguisés en loups semblait être une bonne idée. Se rendre compte que le coffre avait été vidé avant leur arrivée, un peu moins. Mais voler une mallette à un client de la banque qui leur avait gentiment suggéré d’aller se faire voir, c’était signer leur arrêt de mort.
À Belfast, on sait qu’il faut être fou pour ne pas perdre la tête, et qu’il ne faut pas s’attaquer à ceux qui ont « l’Alzheimer irlandais » : ceux qui oublient tout sauf la vengeance.
Je n’avais jusqu’à aujourd’hui jamais lu un roman de Sam Millar, un auteur nord-irlandais pourtant connu et reconnu pour ses polars à l’humour très noir. Voilà qui est maintenant chose faite et je ne regrette pas un seul instant : dans le genre, c’est excellent !
En revanche, mieux vaut être prévenu : âmes sensibles abstenez-vous !
Si Sam Millar excelle dans le genre du polar noir c’est parce qu’il fait preuve d’un immense réalisme dans ce qu’il raconte… tout simplement car il a lui-même expérimenté le milieu ! Ancien activiste politique de l’IRA et braqueur de banques, l’auteur a fait de la prison et n’est pas un enfant de chœur… tout comme les personnages qu’il met en scène ici !
Le prologue donne le ton : un couple est assassiné dans son lit au milieu de la nuit… par leur jeune garçon de 11 ans qui retourne ensuite tranquillement se coucher avec ses comics, comme si de rien était !
S’en suivent ensuite des chapitres mettant en scène des petits braqueurs sans envergure qui se retrouvent dans de sales draps après un hold-up au cours duquel ils ont pillé la mauvaise personne, des flics plus ou moins ripoux, des tueurs à gage sans pitié et des républicains irlandais membres d’une organisation armée pourtant soi disant éteinte… Bref, chacun semble animé par une vengeance personnelle et tout le monde semble jouer un double jeu.
Ce Belfast des années 2000 paraît bien gris et corrompu jusqu’à la moelle. La pluie quotidienne ne parvient pas à effacer les traces et à faire oublier les trahisons, on s’attend à tomber sur un règlement de compte à chaque coin de rue… tout ça fait froid dans le dos !
Comme je vous le disais plus haut, Sam Millar n’épargne aucun détail dans ses passages ultra réalistes de meurtres, tortures, prostitutions… et pourtant, il apporte également une certaine touche de légèreté en adoptant un ton bien particulier. Les scènes nous sont racontées comme à travers une loupe amincissante, comme si l’auteur et le lecteur se situaient au dessus des personnages et bien à distance de leurs actes. J’ai eu comme l’impression que Sam Millar prenait de haut ses héros, quasiment en se « moquant » de leurs agissements. Cet humour noir assumé nous permet ainsi de sourire malgré l’horreur des situations décrites ; ouf.
Essentiellement composés de dialogues percutants, les chapitres sont courts et s’enchaînent à fond de train ; c’est ultra rythmé et dynamique, on ne voit pas le temps défiler.
On passe de chapitres mettant en scène Charlie Madden, Jim McCabe et Brian Ross (les trois petits voyous un peu ridicules) à ceux suivant Harry Thompson, le flic bientôt à la retraite qui aurait aimé un dernier mois beaucoup plus peinard mais aussi aux rituels de Rasharkin l’énigmatique tueur à gage, aux réunions tendues de Seamus Nolan, Conor O’Neil… étant donné les patronymes, plus de doute, on est bien en Irlande (du Nord) !
La plongée dans la noirceur de l’Irlande du Nord n’est pas de tout repos mais le voyage est bel et bien là et est réussi. Sam Millar maîtrise les codes du roman noir. Il y apporte un réalisme ultra précis basé sur ses propres expériences, le tout allégé par un humour noir hyper efficace. J’ai été embarquée de A à Z ; je lirai donc d’autres livres de cet auteur, c’est sûr et certain !
Ping : [BILAN] Novembre - Décembre 2021 ⋆ BAZAR DE LA LITTERATURE
Merci. many thanks for reviewing my new French book. very much appreciated.
Thank you to you for this very realistic dive into dark Belfast. I had the chance to spend a few days there in 2014 but, as a perfect tourist, I was not at all aware of the history of the city and its torments. I hope to be able to return soon for a few days but I will avoid the abandoned church on Limestone Road! Looking forward to reading another of your novels. Thank you!
Merci.