Missouri 1627 de Jenni HENDRIKS et Ted CAPLAN
Missouri 1627
de Jenni HENDRIKS
et Ted CAPLAN
Bayard Jeunesse,
2021, 361 p.
Première Publication (vo) : 2019
Pour l’acheter : Missouri 1627
Après des études de cinéma, Jenni Hendriks part s’installer à Hollywood où elle devient notamment scénariste de la série à succès How I Met Your Mother.
Ted Caplan travaille dans l’industrie cinématographique depuis plus de 20 ans. Il a exercé ses talents en tant que monteur et superviseur musical dans Deadpool (2016), Big Fish (2003) ou encore The Hate U Give (2018). Il est également scénariste et a participé à l’écriture de L’Odyssée de Pi (2012) et de Slumdog Millionaire (2008).
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Veronica est une ado de 17 ans à qui tout réussit. Jolie fille populaire et major de sa promotion, elle vient d’être admise dans la prestigieuse université de Brown. Ses parents sont très fiers de sa réussite. Et effectivement, sa vie semble toute tracée ! Pourtant le jour où Veronica découvre qu’elle est enceinte : son monde s’écroule. Ses chances d’intégrer l’une des meilleures écoles sont menacées.
Son petit ami est un loser et elle n’est pas prête à être mère. Mais Veronica vit dans le Missouri, un état où l’accord parental est indispensable pour qu’une mineure puisse avorter. Et elle sait qu’elle ne pourra jamais compter sur le soutien de ses parents. Sa seule solution : se rendre dans une clinique au Nouveau-Mexique, à près de 1 500 kilomètres de chez elle. Désespérée, elle se tourne vers son ex-meilleure amie, Bailey, punkette affranchie, pour effectuer les 14 heures de route qui les séparent de la clinique.
Peut-être avez-vous vu passer la couverture de Missouri 1627 sur les réseaux sociaux ? Elle attire l’œil. Je l’avais repérée alors même que je n’avais aucune idée de l’intrigue qui se cachait derrière. La quatrième de couverture a fini de me convaincre et c’est avec enthousiasme que j’ai dévoré ce roman qui se veut léger tout en abordant de nombreux sujets très importants.
Missouri 1627, écrit à 4 mains par deux professionnels du cinéma, est un roman d’abord destiné à un lectorat ado (et jeune adulte) qui parle principalement d’une thématique : l’avortement.
L’avortement ok, mais pas n’importe où. Non : aux États-Unis.
Le pays où, une adolescente de 17 ans enceinte doit parcourir 1627 kms pour trouver une clinique qui accepte de procéder à l’acte sans avoir besoin de la signature d’un adulte « responsable » (de ses parents).
Veronica, suit sa dernière année de lycée lorsqu’elle découvre qu’elle est enceinte. C’est l’une des jeunes femmes les plus populaires de l’établissement, bientôt majeure de sa promo et chef de file du mouvement pour la chasteté. Alors que la réalité la rattrape, elle ne peut se confier à personne. Ni à ses « amies » qui la jugeraient et la banniraient de leur groupe, ni à son petit-ami qu’elle n’est même pas sûre d’aimer et encore moins à ses parents, catholiques convaincus et pratiquants.
La jeune fille traverse cette épreuve, pleine de doutes et de peurs. Elle va ouvrir les yeux sur la vie qu’elle mène et le comportement de ses proches envers elle. Elle va reprendre possession de son corps, prendre conscience que le regard des autres régit sa vie (notamment à travers le prisme de son téléphone et des réseaux sociaux) et faire l’amer constat que la notion de consentement n’est pas évidente pour tout le monde, surtout pas pour son boyfriend. Quel sale type ! Dans le genre glauque, il remporte la médaille d’or haut la main !
Alors que Veronica pense devoir se débrouiller seule, elle trouve une aide inespérée en la personne de Bailey, la marginale du lycée. Elles étaient amies lorsqu’elles étaient enfants, mais en grandissant, leur chemin se sont séparés et les anciennes amies sont devenues ennemies. Elles ne sont pas tendres l’une avec l’autre : Bailey, très franche, n’hésite pas à remettre Veronica à sa place et cette dernière ne se prive pas pour mettre le doigt là où ça fait mal. Pourtant, les deux jeunes filles vont réapprendre à cohabiter et vont pouvoir compter l’une sur l’autre.
Bailey c’est vraiment mon petit coup de cœur du roman. Un poil déjantée et sans filtre, elle offre un vent d’humour et de légèreté à l’aventure. Quelle maturité et force de caractère ! On aurait pu imaginer qu’elle n’occuperait qu’un rôle secondaire derrière sa camarade enceinte mais non, elle est une héroïne, au même titre que Veronica.
En revanche, petit bémol à apporter à cette lecture : globalement des personnages manichéens et des situations assez abracadabrantesques. Tout paraît assez exagéré, dans l’excès. J’ose espérer que de telles personnalités tranchées n’existent pas vraiment et que les êtres humains sont plus complexes… Et même si elles sont souvent assez drôles, je pense malheureusement que la plupart des scènes vécues par les deux filles sont hautement improbables pour ne pas dire pas du tout crédibles.
Cela dit, pour marquer les esprits et faire passer les messages (notamment aux lecteurs les plus jeunes), l’utilisation de figures (et de situations) « extrêmes » est assez efficace. On s’indigne et on s’en souvient !
J’ai aimé Missouri 1627. J’ai aimé le traitement des sujets tels que l’avortement, le consentement, l’addiction aux réseaux sociaux, l’amitié… J’y ai trouvé profondeur et légèreté. Ce titre questionne et met le doigt sur des sujets qui fâchent mais le fait avec beaucoup d’humour et surtout, sans ton moralisateur. Si vous cherchez un titre à proposer à des (grands) ados, mettez leur celui-ci entre les mains !