Journal d’une sorcière de Celia REES
Journal d’une sorcière
de Celia REES
Éditions du Seuil,
2007, 251 p.
Première Publication (vo) : 2000
Pour l’acheter : Journal d’une sorcière
Celia Rees, née le à Solihull dans les Midlands de l’Ouest, est une romancière anglaise. (Wikipédia)
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Mars 1659. Suite à l’exécution publique de sa grand-mère, condamnée pour sorcellerie, Mary s’embarque pour le Nouveau Monde – l’Amérique – afin d’échapper au même triste destin. Un interminable voyage commence à bord de l’Annabel, voyage dangereux s’il en est pour la jeune Mary qui doit faire face aux regards méfiants et à l’austérité des colons puritains embarques à ses côtés. Promiscuité, découragement, superstition, mais aussi amitiés et amours naissantes font le quotidien de la jeune fille, livré à son journal. Dans un XVIIe siècle où fièvre religieuse et barbarie se croisent, où tout reste à découvrir, cette adolescente décidée, en recherche permanente de sa propre identité, dépassera ses craintes et les conventions sociales pour aller à la rencontre du monde, de l’autre et de la connaissance…
J’avais très envie de lire ce Journal depuis sa publication française au début des années 2000. Il semble depuis, avoir marqué de nombreux lecteurs et être entré dans les mémoires comme un « indispensable » de la littérature jeunesse. C’est donc avec beaucoup de curiosité et tout de même quelques attentes, que je me suis plongée dans le témoignage d’une jeune sorcière du XVIIe siècle… sans être déçue, je n’ai pas été autant happée, émue et retournée que je l’escomptais. Peut-être un peu trop vieille je suis maintenant, finalement. 🙂
C’est en mars 1659 que l’on fait la connaissance de la jeune Mary. On entre de plein fouet (violemment !) dans sa vie alors qu’elle nous raconte l’exécution soudaine de sa grand-mère, accusée de sorcellerie. Les premières pages de ce journal intime sont assez intenses, j’ai même été surprise de trouver ces scènes dans un titre résolument tourné vers la jeunesse.
Mais finalement, heureusement ou pas, la suite n’est plus du même acabit. Certes la tension et l’angoisse sont là tout du long, quelques amorces font monter la pression, mais le tout reste assez en surface. Et je crois que finalement, c’est là ma déception. Parce que j’avais en tête la BD Les Filles de Salem, intense, n’hésitant pas à entrer dans les détails et à aller au bout de l’horreur (ce qui est, à mon avis, nécessaire pour prendre l’ampleur de la folie meurtrière abattue sur la ville de Salem au XVIIe siècle). Ne pas trouver la même force et émotion ici, voilà ce qui m’a manqué.
Ce Journal d’une sorcière est une introduction, on y découvre tout ce qui s’est passé avant les horreurs de Salem que l’on connaît. C’est la plongée dans le quotidien de la communauté puritaine, au cœur des journées d’une jeune fille comme Mary déjà presque à moitié coupable parce qu’elle est née femme et plutôt jolie. Alors le fait qu’elle soit étrangère aux familles ici rassemblées et qu’en plus elle adopte des comportements étranges, ne font que renforcer tous les soupçons de ceux qui l’entourent.
Parce que l’adolescente fuit l’Angleterre après l’exécution de sa grand-mère, désireuse de commencer une nouvelle vie loin de ses origines. Elle embarque sur un bateau, intègre la communauté puritaine en se liant d’amitié avec quelques-uns de ses membres et les suit dans le Nouveau-Monde, jusqu’à la nouvelle ville de Salem et ses alentours riches de denrées. Là-bas elle pense pouvoir s’installer et vivre sa vie tranquillement mais son passé n’est jamais loin, sa nature la rattrape. Sa nature curieuse, libre et aventureuse… c’est à dire tout ce qui déplait aux hommes à la tête des puritains.
Mary ose se lier d’amitié avec des amérindiens vivant dans le coin, curieuse de la diversité de l’âme humaine, peu sensible aux questions d’appartenance à une race. Vue plusieurs fois en leur compagnie, l’étau se resserre sur la jeune fille. Elle vit dans la peur d’être découverte et de subir le même sort que sa grand-mère quelques mois plus tôt en Angleterre. Surveillée, le moindre faux pas peut la mener à sa perte. La tension montante est perceptible et bien décrite… mais encore une fois, le journal se termine alors que tout semble commencer.
Le style utilisé est assez surprenant. L’écrit se voulant être un témoignage du XVIIe siècle, il ne peut être être aussi moderne que ce que l’on a l’habitude de lire au XXIe siècle… et pourtant, il n’est pas non plus exactement représentatif du siècle dans lequel il s’inscrit puisque ce serait difficilement compréhensible pour les lecteurs d’aujourd’hui. On se retrouve donc dans un entre-deux un peu étrange et un peu froid à mon goût. Une narration du point de vue interne peut normalement apporter une belle empathie car une grande proximité avec le narrateur mais je suis malheureusement restée assez imperméable au récit de l’adolescente. Et j’en suis la première déçue.
Journal d’une sorcière est une introduction, un premier pas pour comprendre les événements survenus à Salem au XVIIe siècle. C’est un témoignage certes fictif mais tout de même édifiant sur ce qu’ont pu vivre les jeunes femmes au cœur de cette communauté puritaine. C’est un roman qui reste malgré tout assez introductif et en surface – sans doute du fait du public cible. Sur le même sujet, je lui ai préféré la BD Les Filles de Salem, plus développée, intense et émouvante.
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