My Absolute Darling de Gabriel TALLENT
My Absolute Darling
de Gabriel TALLENT,
traduit par Laura DERAJINSKI
Editions Gallmeister,
2018, 454 p.
Première Publication (vo) : 2017
Pour l’acheter : My Absolute Darling
Gabriel Tallent est né en 1987 au Nouveau-Mexique et a grandi en Californie. Il a mis huit ans à rédiger My Absolute Darling, son premier roman qui a aussitôt été encensé par la critique et fait partie des meilleures ventes aux États-Unis. Il vit aujourd’hui avec sa femme à Salt Lake City.
♣ ♣ ♣
A quatorze ans, Turtle Alveston arpente les bois de la côte nord de la Californie avec un fusil et un pistolet pour seuls compagnons. Elle trouve refuge sur les plages et les îlots rocheux qu’elle parcourt sur des kilomètres. Mais si le monde extérieur s’ouvre à elle dans toute son immensité, son univers familial est étroit et menaçant : Turtle a grandi seule, sous la coupe d’un père charismatique et abusif. Sa vie sociale est confinée au collège, et elle repousse quiconque essaye de percer sa carapace. Jusqu’au jour où elle rencontre Jacob, un lycéen blagueur qu’elle intrigue et fascine à la fois. Poussée par cette amitié naissante, Turtle décide alors d’échapper à son père et plonge dans une aventure sans retour où elle mettra en jeu sa liberté et sa survie.
Un roman encensé !
Je découvre enfin les éditions Gallmeister qui remportent un joli petit succès ces dernières années. Spécialisée dans le nature writing à l’américaine, la maison propose donc principalement des traductions. Avec My Absolute Darling, un des gros succès de l’année 2017 aux États-Unis, elle traduit le premier roman de Gabriel Tallent. Du talent, le jeune auteur semble en avoir puisqu’il fait quasiment l’unanimité des deux côtés de l’océan Atlantique. Alors, suis-je moi aussi convaincue par ce premier roman ? La réponse est oui, mais pas non plus de façon absolue.
Un style précis, immersif
La première chose qui frappe avant même de commencer cette lecture, c’est la densité des paragraphes. Effectivement, les descriptions sont légion et les détails ne manquent pas, bien au contraire. Adeptes des dialogues nombreux et des livres légers qui se dévorent en une poignée de minutes, passez votre chemin. Gabriel Tallent plante le décor et pose ses personnages dedans.
Vous découvrirez les moindres détails de la vie de Turtle et de l’univers dans lequel elle évolue, des œufs qu’elle gobe chaque matin avant de partir au collège en passant par ses longues observations de la veuve noire ayant élue domicile dans un coin d’un des rebords de la baignoire. L’auteur propose des arrières-plans nets, précis et quasi scientifiques à ses scènes mais les actions de celles-ci passent davantage dans le ressenti et donc dans l’implicite. Ça n’en est pas moins efficace et prégnant, bien au contraire !, à commencer par les terribles scènes incestueuses.
L’immersion est totale, visuellement, sensitivement, émotionnellement. Et c’est sans doute la force du récit.
Une héroïne surprenante…

L’autre force de Gabriel Tallent réside dans ses personnages. Turtle principalement, bien sûr. Dans ses relations avec les autres (son père évidemment) et dans son évolution psychologique. Je ne vais pas le cacher, au début de ma lecture, cette adolescente de 14 ans m’insupportait. Renfermée, impolie, vulgaire, désagréable, intouchable… je n’arrivais pas à saisir sa façon de penser. Et puis, on entre dans sa vie.
Au fil des pages, le quotidien de Turtle nous apparaît. Une routine bien huilée, un avenir qui semble assez désespéré. Une mère décédée, un père très présent. Très présent. Trop présent. Un père possessif dont l’emprise terrible a marqué la jeune fille. Alors quand les portes de sortie se présentent à elle, même si une partie d’elle souhaiterait les franchir et vivre une autre vie, l’autre ne peut se détacher de cette figure paternelle quasi divine. Comme un syndrome de Stockholm finalement, l’adoration de son sauveur bourreau. Et Gabriel Tallent parvient brillamment à nous dépeindre ce déchirement de la jeune fille et son penchant – lent mais présent – vers une sortie.
… et ceux qui l’entourent
Ce sont sa rencontre avec d’autres figures secondaires du récit qui créeront les électrochocs nécessaires et salutaires. Des rencontres qui comptent, de celles qu’on n’oublie pas, qui nous marquent. Elles aussi. Jacob oui, mais deux autres figures également, féminines cette fois. Je ne vous en dis pas plus et vous laisse la possibilité de la découverte.
Globalement j’ai apprécié toutes les personnalités dépeintes par Gabriel Tallent. Même le père, même le tortionnaire qu’on déteste évidemment, mais qui ne possède sans doute pas que des côtés sombres. Finalement celui qui m’a laissé la plus sceptique, c’est peut-être Jacob, pourtant personnage clef. Je ne lui ai pas trouvé grand intérêt à part justement l’intérêt qu’il semble porter à notre Turtle. Mais après tout, ce n’est pas le lecteur qu’il était censé convaincre.
Je ne peux pas considérer My Absolute Darling comme un coup de cœur et je ne sais pas si je le conseillerais vraiment à d’autres lecteurs. En revanche, nul doute qu’il restera un très très très long moment dans ma mémoire tant l’atmosphère, les personnages et les émotions créés par Gabriel Tallent m’ont semblé palpables.
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