Le Gang des rêves de Luca di FULVIO
Le Gang des rêves
de Luca di FULVIO,
traduit par Elsa DAMIEN
Slatkine & Cie,
2016, p. 716
Première Publication (vo) : 2015
Pour l’acheter : Le Gang des rêves
Dramaturge, le Romain Luca Di Fulvio est l’auteur de dix romans. Deux d’entre eux ont déjà été adaptés au cinéma : ce sera le destin du Gang des rêves, qui se lit comme un film et dont chaque page est une nouvelle séquence.
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Une Italienne de quinze ans débarque avec son fils dans le New York des années vingt… L’histoire commence, vertigineuse, tumultueuse. Elle s’achève quelques heures plus tard sans qu’on ait pu fermer le livre, la magie Di Fulvio.
Roman de l’enfance volée, Le Gang des rêves brûle d’une ardeur rédemptrice : chacun s’y bat pour conserver son intégrité et, dans la boue, le sang, la terreur et la pitié, toujours garder l’illusion de la pureté.
Je le dis régulièrement : je ne suis pas une grande amatrice et donc lectrice de littérature contemporaine. Je m’y plonge parfois mais suis très rarement emballée. A vrai dire, je m’y ennuie vite et ça ne me fait quasiment jamais vibrer. Le Gang des rêves m’a non seulement fait vibrer, mais il m’a en plus mis une petite claque émotionnelle. Je n’avais pas été autant embarquée par le destin de personnages de romans depuis longtemps et franchement, ça fait du bien !
Je redoutais un peu l’épaisseur du livre (plus de 700 pages ce n’est pas rien !) mais Louise – l’attachée de presse – avait raison, je ne les ai pas vues défiler et j’aurais bien pris 300 pages de plus car quitter les héros a été un véritable déchirement !
Tout commence en Italie où l’on découvre une toute jeune adolescente – Cetta – que sa mère force à boiter pour éviter d’attirer les regards du grand patron. Malheureusement pour elle, la jeune fille n’échappe pas à son destin et finit par se faire violer dans un champ alors qu’elle n’a pas 15 ans. De cette agression naîtra Natale, rebaptisé Christmas dès leur arrivée à New York. La jeune femme a fuit la misère italienne, pensant trouver une vie meilleure aux Etats-Unis… mais elle comprend bien vite que pour s’en sortir et surtout pour offrir une vie de « vrai américain » à son fils, il faudra qu’elle vende son corps.
J’ai été captivée dès les premières pages et l’ai été encore plus dès que l’histoire se tourne plus franchement sur l’aventure du jeune Christmas, alors adolescent dans les années 20. Il connaît le métier de sa mère et a dû subir les brimades des autres enfants à ce sujet ; il a trouvé l’image d’un père en Sal, le « bienfaiteur » de Cetta et c’est notamment grâce à ces deux figures parentales qu’il devient le jeune homme qu’il est. Brillant, rusé, déterminé mais aussi conscient du Bien et du Mal, Christmas essaye de faire sa place dans les rues new-yorkaises malfamées. Rejeté par les membres d’un gang, il décide de créer le sien qu’il baptise les Diamond Dogs et entoure ce nom de toute une aura de mystères. Sans jamais bouger le petit doigt, juste en faisant croire aux autres ce qu’ils ont envie de croire, Christmas devient quelqu’un qui compte dans le quartier.
Sa vie change du tout au tout lorsqu’il découvre le corps meurtri et mutilé d’une jeune fille qu’il accompagne jusqu’à l’hôpital. Cette adolescente, qui ne quittera alors plus ses pensées, s’appelle Ruth. Elle n’a que 13 ans, est fille d’une famille juive riche et a croisé le chemin de Bill – un tueur en série en devenir – qui l’a violée, l’a tabassée et lui a tranché un doigt pour récupérer une bague de valeur. Marquée à vie, celle qui devient la deuxième héroïne du roman a bien du mal à sortir la tête de l’eau et ce ne sont pas ses deux parents, complètement à côté de la plaque, qui lui viennent en aide. Heureusement, combative et elle aussi déterminée, Ruth se reconstruira petit à petit, malgré ses constants besoin de fuir une réalité qui la rattrape.

Je pourrais vous raconter encore bien des choses sur ces héros et sur leurs aventures car tout m’a passionnée dans ce livre. J’ai vibré avec Cetta puis ensuite avec Christmas et Ruth. J’ai douté avec eux, j’ai eu du chagrin en même temps qu’eux et j’ai eu le cœur serré à plus d’une reprise en découvrant leur destin.
Parce que cette histoire, dans le New York des années 10/20, c’est dur, c’est dramatique, il y a du sang, de la violence, de la misère sociale, du racisme, du sexisme… mais il y a aussi ces personnages animés d’une grande force et qui ne lâchent rien. Malgré les épreuves qu’ils subissent, une certaine pureté persiste en Ruth et Christmas et c’est cette touche que l’auteur a si bien su retranscrire sur le papier et que j’ai si bien su saisir et m’approprier.
Si j’ai été touchée par l’aventure de l’adolescente, je crois que j’ai été encore plus émue par celle du jeune homme qui est un personnage vraiment époustouflant. Ce n’est pas un sur-homme, pas un super-héros, ce n’est pas une figure parfaite… c’est juste un jeune garçon qui tente de survivre dans la jungle new-yorkaise des années 20 et qui le fait brillamment. J’ai aimé le suivre tout au long de ces années, j’ai aimé son évolution, ses doutes et parfois ses erreurs et surtout, j’ai adoré sa ténacité. Christmas c’est vraiment le genre de héros qui me parle et me touche grâce à ses zones d’ombre et de lumière.
Si la lecture se révèle passionnante et addictive c’est grâce à la plume de Luca di Fulvio, incisive, percutante, jamais dans l’excès (les descriptions et dialogues sont hyper bien écrits, jamais de fioritures inutiles) mais aussi grâce à la construction du récit. En effet, l’auteur a choisi un point de vue omniscient et passe d’un personnage à l’autre au fil des chapitres. La focalisation se fait grâce à la troisième personne du singulier à chaque fois, pas de « je » donc, mais tout de même une grande empathie pour toutes les figures présentées. Le lecteur sait ce qui se passe pour chacun des personnages, naviguant de l’un à l’autre, d’un chapitre à l’autre.
On retrouve donc, globalement, 4 focalisations différentes : la première est celle qui s’attarde sur Cetta, c’est un point de vue qui va un peu s’étioler au fil des pages puisque la jeune femme devenue mère laisse petit à petit la vedette à son fils et aux autres héros. C’est ainsi que l’on suit, avec énormément d’engouement, les péripéties de Christmas, Ruth et Bill (le tueur en série), celui-ci ayant un lien important avec les deux autres adolescents et se trouvant régulièrement sur leur chemin (mais je ne vous en dis pas plus).
Je ne sais pas si cette histoire sera un jour adaptée au cinéma mais je le souhaite de tout mon cœur parce que l’histoire s’y prête parfaitement bien et parce que j’aimerais tellement pouvoir mettre d’autres images (autres que celles créées par mon imagination) sur les visages de Christmas, Ruth, Cetta et sur ce New York des années 20, entre la Prohibition, les gangsters qui faisaient la loi dans les rues, les flappers (les jeunes femmes qui se coupaient les cheveux à la garçonne pour s’émanciper) et tout le reste…
J’aimerais tellement avoir réussi à vous convaincre de feuilleter ce Gang des rêves et j’aimerais tellement que vous viviez cette aventure aussi passionnément que moi… Et surtout, n’ayez pas peur des 716 pages de récit car quand on arrive à la dernière, on aurait clairement voulu qu’il y en ait plus !
Un immense merci à Louise, à Slatkine & Cie et évidemment à Luca di Fulvio pour cette merveille !
Lyonnais(e)s, profitez-en, Luca di Fulvia est invité le 7 décembre à la librairie L’Esprit Livre (dans le 3ème arrondissement)… Toutes les informations sont ici !
Je l’ai fini il y a quelques jours, et ça a été un coup de cœur pour moi aussi. On est vraiment dans une épopée moderne merveilleuse !
On rentre très vite dans l’histoire, et une fois qu’on y est, on est plongé entièrement dedans à la vivre avec les personnages, si bien que le côté grosse brique (dans les 945 pages en poche) n’a plus rien d’intimidant, et rendu à la fin on se surprend à se dire qu’effectivement on n’aurait pas craché sur quelques centaines de pages de plus tant c’était passionnant.
Évidemment Christmas prend très vite quasiment toute la place, mais quel gamin, quelle destinée ! Il y a aussi de très chouettes seconds rôles. J’ai aussi beaucoup aimé la « renaissance » au monde de Ruth par la photo (ça donnait envie d’en (re)faire). D’ailleurs la photographie, la radio, le cinéma, tout ça me parlait énormément, tout comme l’époque marquée par ses problématiques sociales, raciales, etc. Je ne peux pas tout lister ce que j’ai aimé, mais tu auras compris que j’ai été complètement emballé.
Je ne comprends pas comment ce bouquin n’est pas encore adapté en film. Enfin si, je sais. Si Luca Di Fulvio avait été américain, ça serait déjà fait.
En tout cas il est certain que je lirai ses autres romans. S’ils sont tous du même acabit, ça va être quelque chose.
J’ai lu plusieurs chroniques très positives sur ce roman qui m’ont donné envie de le découvrir :). Cette lecture me permettra également de découvrir cette maison d’édition. 🙂
Coucou il me tente beaucoup ** A mettre dans ma Wish list 🙂