Le Club Jane Austen de Karen Joy FOWLER
Le Club Jane Austen
de Karen Joy FOWLER
Folio,
2007, p. 375
Première Publication : 2004
Pour l’acheter : Le Club Jane Austen
Karen Joy Fowler est née en 1950. Diplomée en Sciences Politiques, elle a exercé de multiples métiers avant de devenir écrivain de SF et de Fantastique. Elle est surtout connue comme l’auteur du best-seller The Jane Austen Book Club (2004), qui a été adapté au cinéma par Robin Swicord en 2007.
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En ce début de XXIe siècle, un club singulier voit le jour en Californie. Comme d’autres jouent au bridge, cinq femmes et un homme se rencontrent régulièrement autour de l’œuvre de Jane Austen. S’ensuit une sublime chronique sur l’air du temps où la voix de la plus grande romancière anglaise vient éclairer l’éternelle tragi-comédie des sentiments, et son tourbillon de rencontres, d’épreuves, de séductions et de jeux entre l’impossible et le possible que seul peut dénouer l’amour. Car, comme vont le découvrir les membres du club, il n’est peut-être de plus belle fiction que la plus ordinaire des vies.
C’est après avoir découvert – et apprécié – l’adaptation que j’ai eu envie de sortir le livre de ma PAL. Cali l’ayant acquis quasiment au même moment, la lecture commune semblait couler de source. Nous nous sommes donc lancées dans ce texte, le divisant en trois, échangeant régulièrement – quoi que moins passionnément que pendant notre lecture commune d’Orgueil et préjugés – pendant notre découverte. De nos mails, c’est surtout l’ennui et la déception qui sont ressortis.
Le Club Jane Austen n’est pas inintéressant et se lit même assez vite, mais on n’en retire pas grand-chose et surtout, on se demande si la référence à Jane Austen est bien pertinente car après tout, Karen Joy Fowler aurait tout aussi bien pu mettre en place un club autour de Mark Twain (je le cite lui car c’était un féroce critique de Jane Austen, on retrouve une ou deux citations assez cinglantes de sa part dans les annexes), que ça n’aurait pas changé grand-chose… le club n’est qu’un prétexte pour réunir six personnes et revenir sur leur passé et histoire, évidemment dramatiques.
Le texte est grossièrement séparé en sept parties (plus un prologue, un épilogue et des annexes), correspondant à sept mois de l’année, le dernier (novembre) ne s’étalant que sur quelques pages et n’ayant pas vraiment d’importance. Les six premiers (de mars à août), équivalent aux six mois pendant lesquels le club de lecture se réunit. Six mois, six romans majeurs offerts par Jane Austen, six personnages principaux. Evidemment, chaque mois de l’année est lié à un roman et à une figure en particulier.
On découvre donc six personnalités assez différentes, chacune se voulant être le pendant d’un héros austenien (mais bon, ça ne fonctionne que rarement, à mon goût). Jocelyn l’éleveuse de chiens célibataire aime jouer les marieuses comme Emma et c’est la seule, à mon sens, avec laquelle on peut un parallèle à une histoire de Jane Austen. C’est d’ailleurs sans doute la figure qui me marquera le plus dans cette histoire. Sa meilleure amie – Sylvia – vit une période difficile puisque son mari (depuis trente ans) lui annonce qu’il fréquente une autre jeune femme. Avec le soutien de son exubérante fille – Allegra -, elle va réussir à garder la tête hors de l’eau. La jeune femme, de son côté, casse-cou, vit une relation chaotique avec Corinne, une jeune auteure qui lui cache bien des choses… Bernadette, la doyenne aux multiples ex-maris, est un peu celle qui rassemble les autres membres du club sous sa coupe. Une mère pour chacun d’entre eux, en somme. Elle intègre Prudie, la jeune professeur de français un peu… coincée et en conflit avec son bel époux. Enfin, et non des moindres car seul homme du club, Grigg rejoint ces dames, fort de son passé de lecteur de science-fiction. Il n’a jamais lu Jane Austen mais, curieux et soucieux de bien faire les choses, il se lance… et apprécie ce qu’il découvre ! C’est un personnage que j’ai apprécié, contrairement aux autres, il ne semble pas avoir connu d’évènements traumatisants dans sa jeunesse et apporte de la fraicheur à l’histoire. Sa présence entraine également une histoire de cœur… qui met du temps à se révéler !
Si toutes ces figures ne sont pas inintéressantes, ce que je peux leur reprocher, c’est leur passé. A croire que, dans la littérature contemporaine, il faut absolument que les héros aient connu des expériences un peu trash et/ou dramatiques pour que l’auteure trouve quelque chose à raconter. C’est lassant.
Karen Joy Fowler revient donc, dans chaque chapitre, sur le passé d’une de ses figures au moyen de flash-back. Sans être ennuyeux, c’est assez longuet. Et casse surtout énormément le rythme du récit puisque finalement, en se concentrant trop sur le passé de ses héros, l’auteure en oublie leur présent et tout ce qui tourne autour du club de lecture.
Ainsi, si vous ouvrez ce livre en pensant trouver de nombreuses digressions sur les œuvres d’Austen, je vous arrête tout de suite ! Les six romans majeurs de l’anglaise – Emma, Mansfield Park, Northanger Abbey, Orgueil et préjugés, Persuasion et Raison et sentiments – sont tout juste effleurés. Nos six héros abordent quelques théories, reviennent sur quelques points… mais c’est vraiment très court. Seule l’hypothèse concernant Charlotte Collins (dans Orgueil et préjugés), m’a fait sourire (et n’est pas si bête que ça !). Ayant déjà lu les romans cités (à part Mansfield Park), je n’ai pas appris grand-chose et aurais vraiment souhaité qu’on y attarde bien davantage ! Cali qui, elle, n’a lu qu’Orgueil et préjugés, n’a pas eu l’irrépressible envie d’ouvrir un autre livre de Jane Austen en parcourant les quelques échanges proférés lors des rencontres du club. Si quelqu’un qui a déjà lu du Austen n’y trouve pas vraiment son compte et si une novice n’y voit pas non plus grand intérêt, c’est que Karen Joy Fowler a raté son coup, à mon avis.
Le club (et le titre) n’est qu’un mauvais prétexte pour nous raconter les déboires de six américains paumés, chacun à une étape différente de la vie. Le club de lecture les rassemble et les fait avancer, mais les réunions auraient pu porter sur l’œuvre d’un autre auteur, le résultat aurait été le même. Fowler semble juste avoir une tendresse pour l’anglaise (et c’est un nom qui vend bien, il faut l’avouer).
Ce n’est pas mal écrit, ça se lit même assez vite ; mais comme le signale Cali dans sa chronique, un chapitre est à peine lu qu’on oublie déjà ce qu’on y a découvert. Rien n’est marquant, tout est assez fade et sans relief. Dommage.
J’ai noté une bizarrerie qui m’a tracassée pendant toute ma lecture. Quelqu’un pourra peut-être m’éclairer sur ce point. On suit les six personnages de façon extérieure (tous sont interpelés par la troisième personne du singulier… et pourtant, la narration est à la première personne, comme s’il s’agissait de quelqu’un faisant partie du club, comme s’il s’agissait d’un septième membre dont on ne sait absolument rien ? Mais qui ? L’auteure Karen Joy Fowler qui se projette dans son histoire ou Jane Austen elle-même qui assisterait aux réunions et aux aventures de ces six larrons qui parlent de ses histoires ? Mystère et boule de gomme. Si quelqu’un a une hypothèse, je suis preneuse !
J’ai parlé d’annexes en introduction et j’aimerais revenir quelques secondes sur le sujet. A la fin de son histoire, Karen Joy Fowler nous offre les résumés personnels des six romans de Jane Austen (si vous ne les avez pas lus, faites attention, elle spoile à mort en balançant la fin à chaque fois !) mais rassemble aussi et surtout, des dizaines de citations que l’on doit à des « critiques, écrivains et personnalités littéraires » qui commentent « Austen, ses romans, ses admirateurs et ses détracteurs depuis deux siècles ». De 1812 pour la première à 2003 (que l’on doit à J. K. Rowling) pour la dernière, c’est l’occasion de découvrir ce que pensent tous ces gens de la célèbre anglaise. Sir Walter Scott semblait assez séduit alors que Charlotte Brontë et Mark Twain n’y vont pas de main morte ! Ce dernier semble d’ailleurs avoir désiré « exhumer Jane Austen » pour « lui taper sur le crâne avec son tibia ». Vous pouvez le constater, certaines remarques – plus ou moins positives – sont parfois amusantes, parfois enrichissantes… et je suis assez heureuse de les avoir découvertes.
Malgré tout, cette annexe qui donne un ton un peu « professoral » à l’ensemble, ne me paraît pas forcément à sa place. Comme si Karen Joy Fowler avait eu envie (besoin) d’ajouter un élément « sérieux » à son texte, comme pour lui donner une certaine légitimité alors que, concrètement, ce Club Jane Austen n’a d’austenien que le nom…
Les portraits de six américains un peu paumés qui, au détour d’un club de lecture, vont pouvoir se (re)découvrir et apprendre de leur passé. Les références à l’œuvre de Jane Austen – raison première et unique pour laquelle j’ai entrepris cette lecture – sont finalement bien peu nombreuses et ne sont là que pour donner un peu de poids au discours général. Une histoire contemporaine qui aurait peut-être pu me plaire davantage, si je n’avais rien attendu « d’austenien » en l’ouvrant.
L’avis de Cali, qui n’est pas non plus très enthousiaste !
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Il est toujours dans ma PAL et voilà un avis supplémentaire qui va dans le même sens que ce que j’ai déjà lu malheureusement. En revanche, les annexes m’intéressent beaucoup, j’avais d’ailleurs commencé une série d’articles sur les auteurs qui aiment Jane Austen (je ne parlerai pas de ceux qui l’ont critiqué!!), il faudrait que je m’y remette! Et si tu fondes un Club Jane Austen et que tu trouves un Grigg, je suis prête à venir jusqu’à Lyon toutes les semaines!!!
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Cet avis me donne une certitude : je ne le lirais pas, merci 🙂
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J’ai eu la même déception que toi… et je me suis posé les mêmes questions!
Voilà qui me rassure ! Dans l’ensemble, j’ai l’impression que beaucoup sont déçus par ce livre… on en attend sans doute beaucoup trop vu le titre !
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Bon bon bon. Je le lirai, sans grand espoir. Mais je suis curieuse de voir plus en détail ces annexes ! Je savais pour Charlotte Brontë mais pas pour Mark Twain ^^
Ah oui, Mark Twain balance pas mal ! Et il y en a d’autres qui n’y vont pas de mains mortes non plus ! Je trouve que c’est intéressant d’avoir mis les deux critiques, bonnes et mauvaises. Au XIXe comme au XXIe, JA continue d’agacer ou de ravir. 🙂
Tu me confortes dans mon idée que ce livre ne m’attire pas du tout, cette fois je vais m’en tenir au film avec lequel je passe toujours un bon moment, ne serait-ce que pour la fraîcheur de Grigg !
Tu peux te contenter du film, largement ! J’adore Grigg moi aussi. Je me dis que ça vaudrait peut-être le coup de monter un club JA à Lyon, histoire d’avoir un Grigg bis dans nos rangs ? :p